Il y a des gens qui me regardent…

grenouille

Souvent pour démarrer un cours, j’aime rappeler,par une question saugrenue 😉 ou une demande de souvenir, que le comédien se doit d’être « extra voyant ».

Chacun des personnages qui sera joué, travaillé, décrypté, interprété a quelque chose de chaque personne que l’on croise :  on a tous en nous quelque chose des autres… Il suffit d’ouvrir les yeux. Saurez-vous ouvrir les yeux à votre tour ?

Je m’explique :  Je demande à mes élèves de choisir une personne qu’ils croisent régulièrement,  tous les jours, qui fait partie de leurs habitudes mais qu’ils n’ont pas vraiment pris le temps de regarder.

Chacun de nous rencontre tous les jours un tas de personnes presque transparentes, qui sont souvent uniquement reliées dans notre cerveau par leur fonction. Par exemple le chauffeur du bus qui nous emmène chaque jour, la boulangère, le prof de maths, un collègue de bureau, le serveur de la cantine, le facteur, la buraliste…

Je demande à mes élèves alors, dans la semaine suivante, d’observer une de ces personnes transparentes qui croisent leur vie chaque jour et de lui donner un soupçon d’ humanité. Quelle est la couleur de ses yeux, par exemple ? Ou bien, a-t-il ou a-t-elle un bijou (peut-être peut-on imaginer qui le lui a offert : son amoureux (se), son père ou sa mère, sa grand-mère…). Ont-ils, ces invisibles, un tatouage, une cicatrice, de belles mains, une jolie bouche, un vêtement original ?

Cherchez l’intimité de celui ou celle qui croise votre vie sans que vous ne l’ayez jamais remarqué. Je demande aux ados qui me parlent d’un prof « trop nul et trop sadique » de me rapporter la couleur de ses yeux, comment est son sac, si il ou elle a une chaine autour du cou, des boucles d’oreilles…. Aux adultes, je leur demande de regarder la même chose sur leur supérieur, ou sur la personne qui vient nettoyer leur bureau chaque jour, un collègue d’un bureau voisin, l’instituteur de leur enfant…

Je leur demande aussi à chacun, lors d’un rendez-vous avec un ami proche, de le détailler et de découvrir un détail physique qu’ils n’avaient jamais vu. Ou même quelqu’un de leur famille (parents , conjoint, enfant,  frère ou sœur…).  S’apercevoir qu’il ou elle se ronge les ongles, ou a mis un vernis sur ses ongles, ou porte des chaussettes noires ou blanches, que ses cheveux ondulent sur l’oreille, qu’un de ses yeux est plus grand que l’autre, que quand il ou elle sourit, il y a des petits plis nouveaux qui se creusent au coin des yeux…

Le comédien, mais par extension l’être humain ne regarde pas assez les autres. Un petit conseil : quand vous êtes en conflit avec quelqu’un, tentez de regarder mieux la personne. Comme si vous zoomiez sur elle. La main nerveuse sur le stylo, le sourcil qui tressaute, le pied qui tape sur le sol, les mâchoires qui se serrent rappellent que l’autre n’est pas si inhumain qu’on le pense…

Essayez à votre tour. Et dites-moi  qui vous avez choisi et le détail que vous avez remarqué qui a fait que vous ne regarderez plus cette personne tout à fait de la même façon. Ou même que vous avez découvert que votre cher(e) et tendre avait une paillette dans le coin de l’œil droit que vous n’aviez jamais remarquée. Et le monde se restaure, se rénove, se redécouvre…. J’attends vos recherches !! Et en plus de vos commentaires, vous pouvez remplir ce petit sondage (je tente, c’est la première fois que j’en insère un…)

11 réflexions sur “Il y a des gens qui me regardent…

  1. Bonsoir Nath,
    Merci pour cette pause réflexive !Je te rejoins complètement sur ce point : qu’il s’agisse des hommes ou de l’environnement global, nous sommes parfois aveugles.
    Sans que je sache pourquoi, je me sens souvent différente malgré tout (dans le tramway, je suis souvent la seule à admirer les hérons ou le paysage, à repérer des personnes ou des choses qui semblent n’intéresser personne et, assez curieusement, les personnes sensibles et tristes de ne pas exister engagent souvent la conversation avec moi me trouvant a priori naturellement empathique. Même courts, ces moments sont humainement très forts et permettent à chaque « grenouille intérieure » d’exister et de se transformer lui aussi, même de manière invisible à l’oeil (mais pas au coeur) en une très belle personne.. magie de l’humanité profonde.. 🙂
    Belle fin de semaine, à bientôt.
    Cat

    J’aime

  2. Hasard ou non, je partage avec toi le texte d’un auteur inconnu que nous a adressé une de mes contacts Viadeo (psycholo.). Désolée, il est très long mais je trouvais qu’il illustrait bien tes propos.
    Il porte sur les différents masques que nous portons, une invitation à découvrir et à accueillir l’autre avec bienveillance… 🙂

    AIDE-MOI DERRIÈRE MON MASQUE

    Je te donne l’impression que je suis fort
    je te donne l’impression que je suis sécure
    que tout est ensoleillé en moi
    à l’intérieur comme à l’extérieur.
    Que « confiance » est mon nom
    et que « calme » est mon surnom.
    Que la mer est calme et que c’est moi le maître.
    Que je n’ai besoin de personne
    et que je m’arrange tout seul…
    Mais ne me crois pas,
    je t’en supplie, écoute ce que je ne dis pas…
    Regarde-moi, tout semble bien aller;
    je fais un visage sévère ou je ris tout le temps,
    mais sous mon vrai masque toujours changeant qui me cache,
    là est mon vrai moi, mon moi confus, apeuré, seul,
    mais je le cache depuis si longtemps.
    Personne ne doit le savoir,
    mes faiblesses me font peur,
    alors je joue au plus fort et j’ai peur
    que l’on découvre ce petit enfant enfermé en moi,
    qui a tellement soif d’amour et de tendresse
    et qui aurait le goût de pleurer.
    Alors, je me protège contre toi,
    j’ai peur d’être découvert.
    Je me protège de ton regard de bonté,
    de ton oreille trop attentive.
    J’ai peur que ton regard et que ton écoute
    ne soient pas suivis d’accueil et d’amour.
    J’ai peur que comme les autres tu me laisses tomber.
    J’ai peur de baisser dans ton estime
    alors je fais semblant d’être un autre
    en disant par mon attitude « ne m’approche pas ».
    Et pourtant, je voudrais que tu approches.
    J’aurais besoin de t’ouvrir mon cœur
    mais j’ai peur que tu ries de moi.
    et si tout à coup tu riais de moi,
    ton rire me ferait mourir et l’enfant blessé en moi
    s’en remettrait très difficilement.
    J’ai peur, j’ai peur de ma fragilité
    et j’ai peur de ton regard,
    j’ai peur que tu découvres qu’au fond de moi,
    je ne suis rien
    et que je suis si tendre, si fragile, si faible
    là où toi tu parais si fort.
    J’ai peur que tu vois que je ne suis
    qu’un petit enfant blessé sous ma carapace.
    Un petit enfant qui a refoulé ses larmes depuis si longtemps.
    J’ai peur que tu le voies et me rejettes.
    Alors je joue mon jeu, je fais semblant,
    je me durcis, je fais des farces,
    je joue mon jeu de théâtre
    avec mon décor d’homme fort,
    mon décor extérieur de sécurité.
    Et pourtant, à l’intérieur, je tremble.
    Je tremble comme un enfant fragile.
    C’est pour cela que je m’amuse
    à te parler de n’importe quoi.
    Je te dis des riens et je te parle de tout,
    sauf de ce qui crie en moi.
    Je te parle de tout sauf de mon cœur,
    sauf de ma blessure qui saigne.
    Mais je t’en supplie,
    ne te laisse pas tromper
    par mon attitude froide, ou fermée, ou trop superficielle.
    Je t’en supplie, écoute mon cœur qui ne parle pas,
    mais qui aimerais tant pouvoir le dire pour me libérer.
    Car toi seul pourrait me faire croire
    que je vaux vraiment quelque chose,
    qu’il y a du bon en moi
    et que quelqu’un pourrait m’aimer pour moi-même.
    Je voudrais m’ouvrir à toi.
    Je voudrais être spontané, tendre et vrai;
    car au fond, je déteste me cacher
    et jouer ce jeu de masques
    que je joue depuis si longtemps.
    Je voudrais être moi-même mais je n’ose pas, j’ai peur.
    J’ai peur de ne pas être accepté.
    J’ai peur d’être jugé, rejeté,
    et je suis enfermé derrière les barreaux de ma prison intérieure
    et ne sais plus comment ouvrir la porte.
    Alors je t’en supplie, approche-toi doucement…
    il faut que tu m’aides.
    Écoutes ce que je ne dis pas
    et aime-moi derrière mon masque.
    Peut-être que par ton amour inconditionnel
    qui capte au-delà des apparences et des mots,
    j’apprendrai à aimer la personne que je suis!!!

    Aimé par 3 personnes

  3. Hello,
    Effectivement, le langage corporel est un indicateur de beaucoup de chose, et on ne prend pas assez souvent le temps de regarder, échanger, ou tout simplement sourire à la personne que l’on croise régulièrement.
    J’ai fait l’exo et rempli le sondage 🙂
    En tout cas, merci pour ce rappel élémentaire !

    Aimé par 1 personne

  4. Que dire après un commentaire aussi puissant ? Je me lance quand même.
    J’ai fait l’exercice… sur mon chat ! J’ai été surprise non pas d’un détail que je n’aurai pas encore vu, mais d’un détail que je croyais avoir vu. Comme beaucoup de chat de gouttière, son pelage au dessus des yeux, entre les oreilles forme un M… Et ben non, que nenni ! Les pointes du M ne se rejoignent pas. Le M n’existe pas. J’aurais pourtant parier. Un phénomène « trompe l’œil » comme si le cerveau m’avait grillé la priorité en raccrochant l’image trop vite à du déjà vu.
    Autre exemple : je passe devant un espace urbain vide après chantier de démolition. Je vois bien qu’il manque quelque chose, mais quoi ? Ben il y avait… euh.. y’avait ??? Je ne sais plus. Je suis certaine que je ne suis pas la seule à m’interroger.
    Voir sans regarder, une habitude à perdre… encore plus avec l’humain.

    J’aime

    • Oui, je connais bien ces moments de doute où il nous semble qu’on a oublié un élément de sa vie de tous les jours. C’est souvent quand les choses se modifient qu’on s’aperçoit qu’elles avaient existé avant, mais sous quelle forme ? Super pour ton minou et son M pas terminé. Les chats sont étonnants, ils nous trompent et continuent de sourire… Merci Nath pour beau retour. Au plaisir de te lire très vite sur ton blog

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